PROLÉTARIAT ET
CONSCIENCE DE CLASSE, AUJOURD’HUI
[Paru dans Alarme N°3 Jan.Fev.Mars 79]
"Le prolétariat est révolutionnaire ou il n'est
rien". Oui, s'il est vrai que le prolétariat est la classe révolutionnaire
qui en s'émancipant émancipera l'humanité entière détruisant à jamais la
société divisée en classe, il ne I‘est qu’*historiquement. Tant qu'il n'agit
pas subversivement il n'est rien, c'est à dire qu'il nie sa potentialité
révolutionnaire soumis au trio Etat-Capital-syndicat qui poursuit sa route
effrénée vers une barbarie chaque fois plus grande.
La bourgeoisie occupait en tant que classe à la veille de la
révolution bourgeoise le premier rang dans la société de par sa richesse et sa
culture face à une aristocratie en pleine décadence dont la domination ne
correspondait plus au niveau atteint par les forces productives en plein essor
et constituait autant d'entraves pour le progrès social. La bourgeoisie
s'appuyant sur les classes pauvres balaya à tout jamais l'Ancien Régime.
Or qu'en est-iI aujourd'hui pour le prolétariat vivant dans un
monde capitaliste en pleine décadence (voir impossibilité de développement
capitaliste, Alarme n°2). Contrairement à la bourgeoisie du 18ème
s. il n'a ni richesse ni culture, et sa place n'est prépondérante dans nos
sociétés que dans la mesure où il se vend et reproduit ainsi les conditions
objectives de sa propre exploitation et donc de la continuité du monde qui
l'exploite. Il est la dernière classe de l'histoire, la synthèse de
l'exploitation de l'homme par l'homme, et travaille dans une société qui proportionnellement
à sa croissance le rend de plus en plus misérable à tous les points de vue;
misérabilisme culturelle qui en première instance rend la transformation
communiste de la société beaucoup plus difficile aujourd'hui qu'hier.
Tous les concepts communisme, socialisme, internationalisme,
révolution sociale etc..., qui à une certaine époque représentaient quelque
chose de vivant au sein de la classe historiquement révolutionnaire ont été à
tel point déformés qu'ils ne suscitent aucun enthousiasme. C'est l'œuvre
meurtrière de 40 ans de contre-révolution à la tête de laquelle se trouvent les partis staliniens suivis par
leur chien de plus en plus fidèle l'extrême gauche qui ne cesse de réclamer une place légitime au sein du mouvement
anti-ouvrier. S'ajoute à cela l'action du syndicat qui soit provoque des grèves
de 24h pour démontrer sa force d'encadrement au capital, soit détourne et
interrompt brusquement les grèves qui pourraient s'avérer dangereuses pour le
bon fonctionnement du système basé sur le travail salarié dont il est le
fervent défenseur dans les usines. Le syndicalisme dépend de l'existence du
travail salarié dont il se nourrit, et nous ne parlons pas ici seulement des
pays dits socialistes ou il fait partie intégrante
de l'Etat et où donc la bureaucratie
syndicale profite directement de là plus-value soutirée de la force de
travail !
Aujourd'hui, la majorité des grèves sont des grèves
misérables qui loin de démontrer la combativité révolutionnaire du prolétariat
marquent en fait sa profonde soumission. Certes le prolétariat applique la
lutte de classe mais ceci de par sa propre nature puisqu'il est une des
contradictions du système. Mais rares sont les fois où il s'oppose au capital
de manière consciente. Les grèves d'aujourd'hui pour la grande majorité des cas
sont en fait des NON-GRÈVES qui loin de faire trembler le système dans son
ensemble, le renforcent. En effet quelle conscience révolutionnaire peut être
réveillée dans des "grèves" de 24h ou limitées par les appareils
syndicaux, quel enthousiasme, quelle combativité peuvent bien ressortir d'un
prolétariat qui a le chemin tracé pour ses manifestations et dont les occupations
d'usines feraient rougir le prolétariat du siècle dernier. En fait, à
l'exception de quelques grèves sauvages (peu nombreuses dans le monde entier),
le prolétariat ne combat pas sur le terrain de classe.
En schématisant nous obtenons la situation suivante: un
prolétariat de plus en plus ignorant de son propre passé de classe
révolutionnaire, de fortes organisations anti-ouvrières syndicats,
P"C", P"S", L"C""R",, 0"C"
"I" (1) etc… qui savent tenir les gens et
leurs propres troupes dans les rangs, et des organisations révolutionnaires
faibles, très faibles qui contrairement à ce que certaines croient ne pèsent
vraiment pas lourd dans la balance.
Notre devoir et besoin de révolutionnaires n'est pas de nous
gargariser à chaque fois que le prolétariat d'un endroit donné essaye de briser
les chaînes que lui posent toutes les organisations dont nous avons déjà parlé,
mais de lutter pour étendre ce type d'actions, de semer la subversion partout,
et non pas d'être une organisation qui attende le jour “J“ pour diriger le prolétariat
vers le paradis construit artificiellement dans son cerveau irréprochable.
La nécessité d'une ou de plusieurs organisations est
incontestable et représente dans tous les cas une arme que nous n'avons
absolument pas à rejeter bien au contraire. Mais la question qui se pose est la
suivante: quel type d'organisation, quel doit être son rôle avant, pendant et après la
révolution. Thème que nous n'exposons ici que très brièvement.
Sont à rejeter, l'expérience historique du mouvement
ouvrier le prouve:
1°- La conception bolchévique de I
‘organisation: centralisme démocratique qui empêche les tendances minoritaires
de s'exprimer en tant que telles à l'extérieur du Parti, celles-ci étant
obligées de se soumettre à la majorité, et la conception du révolutionnaire professionnel.
2°- La conception bordiguiste du Parti qui se prétendant le
Parti historique du prolétariat
n'entrevoit la révolution que par lui. Son centralisme organique, où le droit de tendance est
supprimé, est à bannir tout centralisme démocratique du bolchévisme. De même
est à bannir l'identification qu'établit le bordiguisme entre dictature du
prolétariat et dictature du Parti.
La classe ouvrière doit cesser de subir l'histoire pour la
faire et cela en tant que sujet conscient. Elle n'admet donc aucune camisole de
force.
Toute prise du pouvoir par une ou plusieurs fractions
organisées de la classe, pour aussi révolutionnaires qu'elles soient,
conduirait à l'échec de la transformation communiste de la société.
L'organisation révolutionnaire est
basée sur un ensemble de positions politiques en relation avec l'analyse
globale de la période ce qui implique qu'elle ne peut avoir de programme
invariant et donc que ses positions sont profondément dynamiques. Elle a pour
but de pousser le prolétariat à l'action révolutionnaire, de pousser au réveil
de sa conscience de classe et à sa généralisation, d'aider le prolétariat et
dans sa lutte quotidienne aujourd'hui et dans la révolution en tant que
fraction plus consciente de la
classe, liée à la classe.
Alarme N°3 Jan.Fev.Mars 79
(1) OCI,
aujourd'hui Courant communiste internationaliste=Parti des travailleurs le
"PT"
LCR dissous en 2009 dans le Nouveau Parti
anticapitaliste (NPA).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire